Libéralisation du dirham: qui paiera la facture?

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Le Maroc passera bientôt à un nouveau régime de change de sa monnaie. Qu’est ce que cela implique ?

Bien qu’annoncée pour le deuxième semestre 2017 par la Banque centrale, soit juillet selon les échos des marchés, cette mesure appelée tour à tour flottement, flexibilité, ou libéralisation du dirham n’a toujours fait l’objet d’aucune récente communication de la part de Bank Al Maghrib.

C’est dire la confidentialité qui est de mise à ce stade avant le jour J, mais aussi le peu d’informations actualisées sur cette mesure qui impliquera une mue de la devise marocaine.

Cette mue progressive prendra en considération plusieurs indicateurs macroéconomiques (réserves de changes, résilience du système bancaire, indicateurs relatifs à la liquidité du marché, etc.), et risque de s’étaler dans le temps, jusqu’à 15 ans selon les experts.

Ce qui va changer
Actuellement le Maroc adopte un régime fixé par Bank Al Maghrib sur la base d’une parité fixe avec rattachement à un panier de devises: 60% de l’euro, 40% du dollar. Ceci avec une bande de fluctuation du dirham de plus ou moins 0,3%. C’est à dire que la valeur du dirham évolue dans un corridor de 0,6% au niveau duquel la banque centrale intervient pour acheter ou céder la devise.

Avec l’entrée en vigueur du flottement du dirham, son cours se formera sur le marché des changes en fonction de la loi de l’offre et de la demande.

Toutefois avant la libéralisation totale de la monnaie, les autorités élargiront dans un premier temps de la future bande de fluctuation. Certains avancent déjà 2,5% de part et d’autre l’intervalle de la nouvelle marge de fluctuation.

Scénario à l’égyptienne ?
L’Egypte a franchi le pas en avril 2016, sous la contrainte du Fond monétaire international (FMI) pour pouvoir bénéficier d’un prêt de 12 milliards de dollars. La conséquence immédiate a été la dévaluation très forte de la lire égyptienne de 30% puis de 50% par la suite.

Concernant le Maroc, le FMI a, en effet, à plusieurs reprises recommandé cette réforme, notamment en mai dernier, à l’occasion d’un conseil d’administration du Fonds monétaire international autour de l’éligibilité du Maroc à la ligne de précaution et de liquidité (LPL) d’un montant de 2,504 milliards de DTS (environ 3,42 milliards de dollars) et qui arrive à expiration le 21 juillet 2018.

Dans un communiqué publié le 15 mai à l’issue de ce conseil d’administration le FMI souligne, entre autres recommandations, «un assouplissement du régime de change qui contribuera à préserver la compétitivité extérieure et renforcer la capacité de l’économie à absorber les chocs».

Le gouvernement marocain pour sa part affirme que cette réforme structurelle est nécessaire et obligatoire. Point important: le Maroc, contrairement à l’Egypte, a procédé par anticipation et à une ouverture contrôlée évitant et raisonné dans l’environnement international de manière, selon la thèse officielle.

Un futur prêt du FMI ?
Mais pour l’économiste Omar Kettani, le Maroc prend cette mesure «exceptionnelle probablement pour bénéficier d’un prêt du FMI justifié par un besoin de liquidité énorme».

La raison, selon lui, est qu’il y a eu une sortie d’argent très forte du Maroc à cause des investissements colossaux du Maroc en Afrique estimés à 4 milliards d’euro. Mais aussi de la mise en place de grands projets au Maroc, tel le TGV qui, par exemple, a mobilisé quelque 3 milliards d’euros.

Baisse du pouvoir d’achat ou compétitivité?
Par ailleurs, Kettani estime que le régime de change flottant va entraîner une dépréciation de la monnaie et du coup impacter le pouvoir d’achat des Marocains.

«N’oubliez pas qu’on a une lacune très importante. Un déficit commercial qui fait que le coût des importations est deux fois supérieur à celui de nos exportations. Dans ce contexte, une dépréciation du dirham induira que nos importations vont coûter encore plus cher», souligne Kettani.

D’autres universitaires et entrepreneurs voient dans cette mesure une aubaine pour nos exportations qui profiteront d’un avantage en termes de compétitivité-prix non négligeable.

Mais peu importe les effets, le cap de la libéralisation a été pris. A l’économie marocaine de s’adapter !

 

 

 

 

 

 

 

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