Interview éco – Driss Effina: «L’année 2021 a permis d’instaurer un climat de confiance»

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Relance économique, inflation ou encore reprise de l’activité industrielle, Driss Effina, professeur d’économie chez l’Institut National de statistique et d’économie appliquée, nous fait le bilan de l’année 2021. L’économiste nous explique, chiffres à l’appui, comment le Royaume a réussi durant ces douze derniers mois à retrouver le chemin de la croissance et ce malgré un contexte mondial fortement perturbé par la crise. 
H24info : Le gouvernement a lancé plusieurs plans de relance économique afin de relancer l’activité après la crise liée au Covid. Un an après, comment se porte notre économie? L’année 2021 a-t-elle été prolifique?

Driss Effina: Les différents indicateurs dont on dispose montrent que, jusqu’à fin novembre 2021, il y a une nette amélioration par rapport à 2020. Certains chiffres affichent une embellie qui dépasse même la situation d’avant la crise du Covid. Il s’agit notamment de la vente de ciments qui a réalisé des volumes supérieurs à ceux de 2019. La production des crédits est repartie à la hausse, y compris et surtout le crédit immobilier qui représente le tiers des crédits. Il y a également la consommation énergique qui s’est accrue de 6,2%. Et Bank Al Maghrib qui table cette année sur une croissance de 6,7%. Ce qui dépasse largement les prévisions des pays de la région MENA et d’Afrique du Nord. En gros, on peut dire, chiffres à l’appui, que 2021 a été marqué par le regain de la confiance.

Il y a des secteurs qui aujourd’hui voient la crise s’éloigner. Comment expliquez-vous la résilience de certaines activités, notamment industrielles, face à une crise d’ordre mondiale ?

Les secteurs les plus compétitifs n’ont pas été très touchés par la crise. Des secteurs comme l’agroalimentaire, l’industrie automobile ou encore le textile qui ont affiché une forte résilience. Il suffit de voir les chiffres d’exportation des véhicules pour s’en rendre compte. Il y a un indicateur qui confirme cette relance de l’industrie. Il s’agit du taux d’utilisation des capacités de production qui a atteint 71% dépassant largement son niveau à fin 2019. Maintenant, il y a le tourisme qui a subi de plein fouet les effets de la crise.  Il s’agit certes d’un secteur économique important, mais qui finalement ne représente que 6% à 10 % du PIB du pays. C’est d’ailleurs pour cette raison que la crise ne s’est pas fait sentir chez nous comme ce fut parfois le cas ailleurs.

Les derniers chiffres de la DEPF révèlent que le Maroc continue d’attirer les IDE, alors qu’actuellement dans le monde entier la tendance est plutôt à la baisse. Qu’est ce qui explique cette performance ?

S’agissant des IDE, les chiffres ne sont pas encore définitifs, mais on peut déjà dire que c’est assez encourageant. Jusqu’au troisième trimestre, le bilan est resté plutôt positif. Si le Maroc demeure toujours attractif malgré la conjoncture mondiale, c’est dû en partie à la stabilité du Dirham. Notre monnaie n’a pas dégringolé, mais bien au contraire elle a conservée sa valeur par rapport au Dollars américain et à l’Euro. L’agence américaine de notation Fitch Ratings, une référence pour les investisseurs, a d’ailleurs confirmé la note du Maroc à « BB+ » avec une perspective stable, Depuis le début de l’année, le Maroc n’a affiché que des signes positifs. C’est ce que cherche les investisseurs.

En 2021, les prix des produits notamment alimentaires n’ont cessé de grimper. Peut-on dire que c’était l’année des hausses ?

Je ne crois pas. L’inflation est une notion assez complexe. Au Maroc, il y a eu effectivement une inflation significative mais elle a touché uniquement certains produits, notamment de luxe. Mais si on parle des produits de tous les jours, ceux que consomment la majorité des Marocains, il n’y a pas eu de hausses énormes. Généralement en 2021, on était plutôt sur une inflation relativement faible grâce à la politique monétaire menée par Bank Al Maghreb. Tout au long de la crise, la banque centrale n’a jamais eu besoin d’activer des mesures comme la planche à billet.

La classe moyenne s’est sentie encore surtaxée cette année à travers la création de nouveaux impôts. Est-ce une simple impression ou bien cette catégorie constitue effectivement une source de revenus considérable pour l’Etat?

Définir la classe moyenne, c’est assez difficile. Mais si parle des salariés et des fonctionnaires dont la situation est assez stable, je ne crois pas qu’ils soient lourdement impactés par la pression fiscale. Il y a d’abord les impôts directs qui sont généralement prélevés à la source. Donc, ces impôts ne peuvent pas être ressentis par ces contribuables. Puis, il y a les taxes indirectes principalement la TVA qui, si l’on voit de plus près, ne pénalise pas beaucoup le pouvoir d’achat. Là, je parle des personnes qui ont une situation stable et qui travaillent dans des secteurs épargnés par la crise. Dans cette même catégorie, on peut également loger les auto-entrepreneurs et les fonctions libérales. Là aussi, il n’y a pas eu d’énorme pression fiscale. Dans certaines professions, il y en a même qui ont vu leurs activités prospérer.

Le tourisme misait sur 2021 pour sauver les meubles, finalement la fermeture des frontières a donné un coup dur au secteur. Certains plaident aujourd’hui pour que le tourisme revoit sa stratégie en privilégiant la demande interne. Qu’en pensez-vous ?

Aujourd’hui, le tourisme vit une période difficile. Je ne crois pas que le moment soit propice à la réflexion ou encore à la remise en question. Ce dont le secteur a le plus besoin c’est surtout de mieux préparer la reprise. Car de toute façon, il y aura, à un moment ou à un autre, une reprise de l’activité. La priorité sera de s’y préparer en améliorant tout ce qui doit l’être. Tout comme n’importe quel secteur, il y a des imperfections et des dysfonctionnements. C’est le moment de les corriger afin de mieux se positionner sur le marché mondial du tourisme. Aujourd’hui plus que jamais la concurrence est rude. Le tourisme marocain doit faire tout son possible pour ne pas rater le coche.

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