Don d’organes: pourquoi les Marocains sont toujours réticents

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À l’occasion de la journée mondiale du don d’organes, le 17 octobre 2024, Amal Bourquia, néphrologue et présidente de l’association Reins fait le point sur la situation au Maroc et nous explique pourquoi les Marocains restent peu favorables à cette action qui peut sauver des vies.

Au Maroc, les besoins sont criants, des milliers de patients souffrent de maladies rénales, hépatiques, cardiaques ou pulmonaires nécessitant une transplantation d’organes. Les solutions alternatives, telles que la dialyse pour les maladies rénales, sont lourdes, coûteuses et limitent considérablement la qualité de vie des patients. Chaque année, des centaines de Marocains décèdent faute de donneurs d’organes disponibles, malgré une législation qui autorise la greffe d’organes depuis 1999.

La pratique de la Transplantation d’organes reste encore sous-développée. Pour le rein, presque le seul organe transplanté au Maroc, on ne recense que près de 645 transplantations rénales, majorité donneur vivant, et un nombre d’inscrits sur les registres toujours dérisoires. Cette situation, encore une fois le besoin urgent de renforcer la sensibilisation, les ressources médicales, et les politiques publiques.

Selon l’association Reins l’avenir de la transplantation d’organes au Maroc repose sur une coopération étroite entre les autorités de santé, les professionnels médicaux, la société civile, et les citoyens. « Ensemble, nous pouvons faire évoluer la perception du don d’organes, renforcer nos infrastructures et sauver des vies. C’est un effort qui requiert la participation de tout un chacun« , souligne l’association.

Lire aussi: Don d’organes au Maroc: comment devenir un donneur potentiel et pourquoi c’est important

Dans une déclaration à H24info, Prof. Amal Bourquia explique que, lorsque l’on aborde la question de la réticence au don d’organe, il est essentiel de considérer l’acceptation des gestes ou des actes concernant son propre corps. Cette acceptation nécessite des connaissances. En ce qui concerne le refus des Marocains, plusieurs obstacles subsistent.

« Tout d’abord, il y a une méconnaissance fondamentale du concept de don d’organe. Beaucoup de gens ne comprennent pas comment se déroulent les prélèvements et les interventions médicales, et ils entretiennent des relations floues avec les hôpitaux. Lorsqu’on leur demande de signer un document de consentement, il est naturel qu’ils refusent, car ils n’ont souvent jamais entendu parler de cette pratique« , affirme-elle. Ensuite, la sensibilisation et la communication autour de ce sujet sont très importantes. Il est vital d’expliquer des concepts comme le coma cérébral et la mort cérébrale. De plus, beaucoup de personnes s’inquiètent de l’utilisation de leurs organes et craignent que ceux-ci ne soient pas utilisés à bon escient. Ces préoccupations sont le résultat d’un manque d’information et de sensibilisation.

D’après la spécialiste, d’autres facteurs contribuent à cette réticence, notamment des interrogations sur la vente des organes et la position de la religion sur le don. « Malheureusement, de nombreuses personnes ne se tournent pas vers des professionnels pour obtenir des réponses claires« , déplore Pre Amal Bourquia.

Selon elle, les médecins ont également leur part de responsabilité. « Beaucoup d’entre eux ne sont pas formés sur les questions de greffe d’organe et ne rencontrent pas ces situations dans leur pratique quotidienne, ce qui les rend moins à l’aise pour encourager les dons ou expliquer les avantages de cette démarche« , explique-elle.

« Nous disposons aujourd’hui de supports numériques pour sensibiliser le public, mais il est crucial de simplifier les procédures, notamment au niveau juridique, et d’opter pour des solutions digitales afin de rendre le processus moins contraignant. En tant que professionnels, nous plaidons depuis des années pour un changement législatif qui établirait le principe du consentement présumé pour tous. Sans cela, nous ne pourrons jamais surmonter cette réticence. Il est indispensable de travailler à un changement des mentalités pour favoriser l’acceptation du don d’organe, car disposer du matériel ne suffit pas. Il faut aussi une ouverture d’esprit de la part des gens« , conclut Pre Amal Bourquia, néphrologue et présidente de l’association «Reins».

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