Cyberviolences envers les femmes: le plaidoyer de l’association « Kif Baba Kif Mama »

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Le monde entier commémore chaque 25 novembre la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Au Maroc, plusieurs associations et mouvements se sont mobilisée à cette occasion pour rappeler une réalité amère qui persiste dans notre société: la cyberviolence envers les femmes.

Au Maroc, la lutte contre les violences fondées sur le genre a encore beaucoup de chemin. Mais en plus des formes traditionnelles de violences connues et répandues dans notre société, ce fléau atteint désormais l’espace virtuel. Lundi 25 novembre, la campagne «Hors de contrôle» a été lancée dans le cadre des 16 Jours d’activisme contre la violence basée sur le genre. Objectif: dénoncer l’usage malveillant des nouvelles technologies et son impact catastrophique sur les droits des femmes et des filles.

La situation est alarmante: 19% des violences envers les femmes sont commises en ligne, rapporte une étude réalisée en 2023 par le Haut-Commissariat au plan (HCP). Pis, ce taux atteint 34% chez les jeunes femmes entre 15 et 19 ans, et les victimes sont majoritairement ciblées par des agresseurs inconnus (73% des cas).

Le monde numérique, espace initialement conçu pour connecter, apprendre et innover, est aujourd’hui détourné. Il devient un terrain où s’exerce une forme insidieuse et destructrice de violence: la violence basée sur le genre facilitée par les technologies (VBGFT). Contactée par H24Info, la présidente de l’association «Kif Mama Kif Baba», Ghizlane Mamouni, décrypte les différents aspects de ce phénomène qui continue de détruire la santé mentale de nombreuses filles et femmes marocaines.

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La militante nous explique que les violences technologiques basées sur le genre se manifestent sous différentes formes, notamment «le cyberharcèlement, le doxxing (exposition d’informations personnelles en ligne), le revenge porn (diffusion non consentie de contenu intime), les menaces de mort ou de viol en ligne, la diffusion de fausses informations (fake news), ainsi que l’utilisation abusive de la technologie pour surveiller, contrôler ou intimider». Ces violences touchent principalement les femmes et les filles, mais également les défenseurs des droits humains, amplifiant les inégalités de genre déjà existantes, fait-elle remarquer.

Quant aux moyens nécessaires pour éradiquer les violences technologiques basées sur le genre, Mamouni indique qu’«il est crucial d’adopter une approche multidimensionnelle. Il faut renforcer les lois et les politiques en plaidant pour des cadres juridiques spécifiques qui criminalisent ces violences et garantissent une protection adéquate pour les victimes». En parallèle, ajoute-t-elle, l’éducation et la sensibilisation jouent également un rôle fondamental en mettant en place des campagnes ciblées pour encourager une utilisation responsable des technologies et promouvoir l’égalité des genres.

Notre interlocutrice insiste sur l’importance du soutien psychologique aux victimes: «Il est essentiel de développer des plateformes d’assistance psychologique et juridique, tout en assurant la confidentialité et la sécurité.» L’accent est aussi mis sur l’importance de promouvoir la responsabilité numérique en encourageant les entreprises technologiques à agir contre les contenus violents et à intégrer des mécanismes de protection plus robustes.

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Des efforts sont déjà consentis pour mettre fin à ces violences. «Les campagnes de sensibilisation, comme Hors de contrôle, mettent en lumière ces violences en mobilisant les médias, les réseaux sociaux et des campagnes visuelles pour toucher un large public», élabore Mamouni.

La lutte contre violence à l’égard des femmes nécessite une mobilisation collective, en impliquant une diversité d’acteurs, et cela vaut également pour le monde virtuel. «Les autorités gouvernementales, y compris les ministères, législateurs et agences de régulation, sont responsables de créer et d’appliquer des lois spécifiques pour protéger les victimes et punir les agresseurs. Les plateformes numériques doivent mettre en œuvre des outils de signalement efficaces et des politiques de modération adaptées pour contrer les abus», préconise la présidente de l’association « Kif Baba Kif Mama ».

Il est également important de souligner le rôle vecteur des éducateurs et des médias, qui «transmettent des messages sur le respect en ligne et contribuent à déconstruire les stéréotypes sexistes». Les citoyens et les communautés locales jouent, de leur côté, un rôle clé en signalant les abus, en soutenant les victimes et en promouvant un comportement respectueux en ligne. Enfin, les chercheurs et universitaires approfondissent la compréhension de ces phénomènes et élaborent des stratégies adaptées pour les contrer. Ensemble, ces acteurs créent un écosystème de prévention, de protection et de justice.

«Nous appelons à une mobilisation collective pour que le numérique devienne un espace sûr, inclusif et transformateur. Ensemble, nous pouvons bâtir un Maroc où chaque femme et chaque fille pourra s’épanouir librement, sans crainte d’être réduite au silence ou attaquée en raison de son genre», conclut Mamouni.

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