Nabil Ayouch: «Everybody Loves Touda est un hommage aux chikhates, ces femmes libres et insoumises»

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Nabil Ayouch

Le réalisateur marocain Nabil Ayouch fait un grand retour avec son dernier film «Everybody Loves Touda», disponible en salles à partir du 11 décembre 2024. H24info a assisté, ce matin, à l’avant-première. Un film qui résonne comme un vibrant hommage aux chikhates, ces femmes libres et insoumises et à Casablanca, la ville de tous les espoirs.

À travers «Everybody Loves Touda», Nabil Ayouch plonge le public dans l’univers de Touda, une artiste traditionnelle qui chante, sans censure ni tabou, des textes empreints de résistance, d’amour et d’espoir. Ce personnage est incarné par la talentueuse Nisrine Erradi, qui livre une performance saisissante en prêtant vie à une jeune femme passionnée par le chant et la danse populaires.

everyody loves touda

Touda, issue d’un petit village, entame un grand combat contre un quotidien cruel marqué par la marginalisation, le harcèlement, les espoirs brisés, la résistance et les désillusions. Malgré les épreuves, elle décide de tout quitter pour les lumières de Casablanca.

Préparation intense et hommage réaliste

La première projection au Maroc a eu lieu lors du Festival International du Film de Marrakech, où le film a été chaleureusement accueilli. Nisrine Erradi a suivi une préparation intense pour son rôle: elle a côtoyé des cheikhates pendant plus d’un an et demi, notamment Khadija El Baidaouia, figure emblématique du chant populaire, décédée en 2022, et Siham El Messfiouia, qui a contribué à son apprentissage. «Il faut savoir que Nisrine a non seulement habité avec une chikha, mais elle a également appris leur langage, leurs gestes, leur quotidien et leur vie. Ce travail acharné a permis de donner toute son authenticité au personnage», précise Nabil Ayouch.

Le réalisateur confie que le prénom Touda, d’origine amazighe, a été choisi pour ses symboliques de force, de patience et de beauté, qui correspondent parfaitement au personnage principal.

Lire aussi: « Everybody loves Touda » de Nabil Ayouch rafle deux prix au festival de Valenciennes

Pour Nisrine Erradi, ce rôle a marqué son parcours artistique et sa carrière professionnelle. «Nous avons travaillé sans relâche pour donner vie à ce film. Cette expérience m’a non seulement enrichie sur le plan artistique, mais elle m’a aussi permis de mieux comprendre et d’incarner l’univers des chikhates. Ce film est une célébration de leur résilience et de leur talent», estime-t-elle.

Place de Casablanca dans le film

Casablanca occupe une place centrale dans cette œuvre. La ville, décrite par Nabil Ayouch comme le «New York du monde arabe», représente une terre de promesses, mais aussi de défis. «Je vis dans cette ville depuis 25 ans maintenant et j’entends son cœur battre, sa violence, sa brutalité, son énergie, son côté sauvage et vibrant. Pour moi, il y a également un côté ville lumière, ville de tous les possibles… C’est une ville qui a été construite par des migrants venus du monde entier, il y a un peu plus d’un siècle et on ressent cette influence de tous ces gens qui, quand ils arrivent, s’y arrêtent et participent à sa transformation. Touda est aussi une migrante qui ne vient pas d’un autre pays, mais de l’intérieur pour s’y installer avec cet espoir et surtout ce rêve que tout est possible à Casablanca», indique le réalisateur de Everybody Loves Touda.

Le film explore ainsi les contrastes de la métropole : son effervescence nocturne, son énergie, mais aussi les sacrifices qu’elle impose à ceux qui y cherchent une vie meilleure.

Fin ouverte

Nabil Ayouch a opté pour une fin ouverte, laissant au spectateur le soin d’interpréter le destin de Touda. «Souvent, dans le cinéma, nous choisissons des fins faciles qui prennent le spectateur par la main. Ici, j’ai voulu proposer une réflexion sur la complexité de la vie de Touda. C’est sûr que dans cette fin elle dit non, c’est une des raisons pour lesquelles j’ai voulu faire ce film pour redonner de la valeur à ces femmes que nous avons maltraitées et que nous maltraitons encore de manière très injuste. Elles ont joué un rôle important dans l’histoire de ce pays,  et nous font toujours vibrer dans des Moussems, les mariages et autres occasions. J’ai voulu dans ce film leur redonner une dignité, un statut d’artistes et c’est un peu ça le message du film.”

“Chikha, ce n’est pas une insulte, chikha c’est une femme libre et insoumise, c’est une artiste qui fait partie de la culture, de l’héritage et des traditions marocaines », conclut Nabil Ayouch.

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