Festival de Cannes: tout comprendre de l’affaire Netflix

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La plateforme vidéo américaine a décidé de ne pas sortir en salles ses deux films en compétition. Face à l’échec d’un accord commun, le Festival de Cannes impose désormais une nouvelle règle pour concourir, dès 2018.

La capacité de Netflix à faire d’une intrigue une série d’épisodes semble avoir contaminé Cannes. Voilà maintenant un mois que l’arrivée de la plateforme américaine à la Croisette fait polémique. Un véritable feuilleton. Nous vous proposons un récapitulatif.

C’est une première, Netflix fait son entrée avec deux films en sélection officielle. Les réalisations de la plateforme de streaming américaine, Ojkade de Bong Joon-ho, réalisateur sud-coréen et The Meyerowtiz Stories de l’Américain Noah Baumbach, font partie de la sélection officielle au festival de Cannes. «Une situation inédite» commente son délégué général Thierry Frémaux. Une situation trop inédite, peut-être, pour les représentants du cinéma français qui craignent que les deux films ne soient finalement projetés en salles. La raison? La réglementation en France impose qu’un film, une fois sorti en salles, ne puisse pas être mis en ligne. Un coup dur pour Netflix, cette plateforme aux 100 millions d’abonnés.

La Fédération nationale des cinémas français (FNCF) conteste la sélection des deux films de Netflix pour la compétition de la 70e édition du Festival de Cannes. Représentative des exploitants français de cinéma, la Fédération «souhaite qu’une clarification rapide soit faite afin que soit confirmé que ces œuvres pourront sortir dans les salles de cinéma en respectant le cadre réglementaire en vigueur, qui est le fondement de l’exception culturelle». Jean Labadie, patron du Pacte, s’emporte sur Twitter: «Netflix veut clairement la mort des salles» alors que Reed Hastings, PDG de Netflix, riposte. Pour lui, les propriétaires de salles «étranglent le cinéma».

La plateforme réfléchit à une «sortie limitée» dans les salles françaises de ses deux films en compétition. «Nous souhaitons que nos abonnés français aient la possibilité de regarder ces films où et quand ils le désireront, comme tous nos autres membres à travers le monde», affirme Netflix dans un communiqué. «Nous sommes convaincus que les cinéphiles français n’ont pas envie de voir ces films trois ans après le reste du monde».

Face à l’échec des négociations et au refus de Netflix de sortir ses deux films en salles, le festival annonce une modification de son règlement pour 2018. «Dorénavant, tout film qui souhaitera concourir en compétition à Cannes devra préalablement s’engager à être distribué dans les salles françaises», est-il écrit dans le communiqué. Les deux films restent dans la compétition tandis que se dessine la perspective d’une Palme d’or qui ne pourrait jamais sortir en salles en France.

Ted Sarandos, directeur des contenus de Netflix, répond à Cannes en déclarant que le festival devrait s’en tenir à «célébrer les arts», sans tenir compte des plateformes. «Historiquement, de nombreux films arrivent au festival de Cannes sans aucune distribution», a-t-il dit lors d’une conférence de presse, organisée pour présenter Okja avant que le film ne soit projeté lors du festival.

Selon lui, c’est au monde du cinéma de s’adapter à l’évolution que prend la visualisation d’un contenu. De plus en plus de films sont disponibles sur des plateformes de streaming, et non pas dans des salles. «Les spectateurs changent, du coup la distribution change, du coup les festivals (…) vont vraisemblablement changer», a-t-il remarqué.

Après avoir apporté son soutien au Festival et aux réalisateurs Noah Baumbach et Bong Joon-ho, les scénaristes françaises remarquent que «cependant, cette polémique -quelques jours avant la prise de fonction du nouveau ministre de la Culture – a le mérite de remettre sur la table deux dossiers qui agitent depuis longtemps le milieu du cinéma français: la chronologie des médias et la contribution des géants du Net, tels que Netflix, au financement de la création», a-t-elle ajouté.

Depuis plusieurs années, les professionnels tentent de réformer cette réglementation. Sans succès. «Force est de constater que les pratiques évoluent tant du point de vue des professionnels que des spectateurs. Et cela nous oblige à agir!», estime la Guilde des scénaristes, qui «appelle l’ensemble des professionnels à accélérer les négociations». Elle appelle par ailleurs l’Union européenne «à revoir au plus vite sa réglementation afin de contraindre tout opérateur diffusant des œuvres au sein des États membres à respecter les prescriptions fiscales, et à remplir ses obligations de financement et d’exposition de la création européenne».

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