Criminalité en Argentine : «l’effet Messi» et la grogne d’une ville meurtrie

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Un groupe de narcotrafiquants a proféré des menaces directes contre Messi. (Crédit photo: Sebastian Lopez Brach/AP/picture alliance)

Il a suffi d’un écriteau avec le nom de Lionel Messi dessus pour que les appareils sécuritaire et politique de l’Etat en Argentine se mettent en branle afin d’apporter une réponse rapide, qui soit à la hauteur de l’impact mondial provoqué par les menaces proférées par des narcotrafiquants présumés contre l’idole des Argentins dans sa ville natale, Rosario. 

Une chose est sûre. Si l’intention des individus qui ont osé menacer Messi était de provoquer un boomerang aux dimensions internationales, ils ont largement réussi leur coup.

Sur l’écriteau improvisé, il était question d’une menace sans équivoque contre le meilleur joueur de football au monde, selon la FIFA, qui plus est dans sa ville natale : « Messi, nous t’attendrons. Javkin (maire de Rosario) est un narcotrafiquant. Il ne te protégera pas ».

Cette menace avait été laissée vendredi à l’aube devant un supermarché appartenant aux beaux-parents de Messi et dont la devanture a été criblée de balles, en guise de signature narco.

S’en est suivi un « séisme politique » qui a ébranlé tous les étages des appareils de l’Etat en Argentine. Dans la province de Santa Fe, dont dépend Rosario, les autorités locales tiraient la sonnette d’alarme depuis plusieurs années sur l’aggravation du phénomène de la drogue dans la région. Les meurtres y étaient quotidiens et les soupçons de connivence entre les gangs de trafic de drogue et la police locale sont étalés quotidiennement sur les pages des journaux.

Lire aussi. Argentine: Lionel Messi menacé de mort

Depuis le début de l’année, les morgues de la ville ont vu défiler au moins 64 victimes de la guerre entre narcotrafiquants, en plus de 225 autres personnes blessées par balle.

Dès le lendemain de l’attaque, le gouvernement fédéral, auquel ses détracteurs lui reprochent de découvrir « subitement » le phénomène de trafic de drogue à Rosario, a décidé d’installer d’un seul coup 600 caméras à reconnaissance faciale dans les rues de la ville pour dissuader les éventuels criminels d’agir.

Ce mardi, le gouvernement a décidé de militariser Rosario en envoyant des centaines d’éléments des forces fédérales dans cette ville sinistrée afin de prêter main forte à la police locale dans l’œuvre de démantèlement des réseaux de trafic de drogue qui s’y sont installés depuis au moins 20 ans.

C’est le président Alberto Fernandez en personne qui a fait cette annonce via une vidéo pré-enregistrées afin de montrer que l’Etat est décidé de prendre le taureau par les cornes.

Vive tension

La réponse apportée par l’Etat fédéral n’est pas uniquement sécuritaire. Le président Fernandez a également annoncé le déploiement du génie militaire à Rosario pour une mise à niveau urbaine dans les quartiers périphériques réputés être des zones de non-droit où les réseaux de trafic de drogue agissent à leur guise.

« Nous allons mettre fin à la violence criminelle des tueurs à gages, de ces marchands de la mort », a tonné le chef de l’Etat dans ce message vidéo, au lendemain d’une journée de colère à Rosario à l’occasion de l’enterrement d’un garçon de 11 ans tué dans une fusillade.

Le président Fernandez a également annoncé un contrôle plus strict du système pénitentiaire où sont incarcérés de puissants «capos» de la drogue, dont les cellules ont été perquisitionnées pendant le week-end afin de confisquer leurs téléphones. Les autorités soupçonnent ces «capos» d’être les véritables donneurs d’ordre pour commettre des crimes.

Lundi, Rosario a vécu une vive tension après l’enterrement de ce garçon tué par balle sur le seuil de sa maison. Des images diffusées en direct par toutes les télévisions du pays ont montré des habitants en furie en train de saccager et détruire des maisons appartenant à des trafiquants de drogue présumés dans un quartier pauvre à la périphérie nord de Rosario.

Les images montraient aussi que les policiers présents sont restés de marbre face à la mise à sac et la destruction des maisons à coup de marteau.

Toutefois, cette mobilisation des forces fédérales pour venir à bout du phénomène de narcotrafic à Rosario a fait grincer des dents dans les rangs de l’opposition, dont la chef de file Patricia Bullrich, a épinglé cette réaction tardive du gouvernement. « Enfin, ils reconnaissent le problème », a-t-elle ironisé sur ses réseaux sociaux.

Il est évident que « l’effet Messi » a été crucial dans les décisions prises au cours de la semaine dernière afin de mettre fin à la terreur vécue quotidiennement par les habitants de la ville natale du récent champion du Monde.

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