Le crédit bancaire a marqué une hausse de 6,5% en mai 2020, avec un accroissement…
Crédit bancaire ou fonds propres, quels choix pour les porteurs de projets ?
Publié leLe crédit bancaire doit-il être un recours systématique pour le porteur de projet ou faut-il engager dans un premier temps des fonds propres ? Cette question a été au centre d’un débat opposant deux visions diamétralement opposées. Celles de Stanislas Zézé, expert financier ivoirien connu en Afrique subsaharienne à travers son agence de notation financière Bloomberg, et Jean-Claude Tshipama, économiste et homme des médias congolais.
Les deux hommes ont croisé le fer à Paris, à l’occasion d’un événement qui a réuni fin septembre la diaspora africaine autour du sujet de l’investissement dans le pays d’origine. Le premier cité, Stanislas Zézé, estime que les porteurs de projets ne doivent pas systématiquement se tourner vers les banques.
Pour le financier ivoirien, un emprunt bancaire ne devrait se faire qu’à la seule condition d’une nécessité absolue. Il justifie son point de vue en expliquant que les banques sont très loin d’être des entreprises philanthropiques. Pour «l’homme aux chaussettes rouges», comme on l’appelle, si l’entrepreneur ou le porteur de projet avait une compréhension éclairée sur le fonctionnement des taux d’intérêt et des tableaux d’amortissement, il serait bien dissuadé d’emprunter.
Un autre argument avancé par le patron de Bloomberg porte sur les différentes garanties exigées par les banques avant de concéder un prêt. Chose qu’il trouve contradictoire d’autant plus que la banque facture un intérêt sur un prêt garanti pourtant à 100%, ce qui enlève le risque imposable. «Si l’emprunt est garanti à 100 %, il ne devrait y avoir ni probabilité de défaut ni perte. Puisque le taux d’intérêt intègre le risque, un emprunt garanti à 100 % ne devrait pas comporter de risques». Aussi, fustige-t-il les intérêts perçus par les banquiers, et invite les porteurs de projets à démarrer leur investissement sur fonds propres, du moment même où les banques ne financent pas l’amorçage.
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Quant au second intervenant, il a réfuté que le rôle de la banque soit galvaudé, expliquant que cette dernière joue un rôle de conseil. «Un banquier est d’abord et avant tout un conseiller. Il te dira quoi faire ou ne pas faire. Pourquoi ? Parce que le banquier est au cœur de l’activité économique, avec une vision à 360° de la situation du pays», a expliqué Jean-Claude Tshipama. Il en a profité pour élucider la différence entre une garantie collatérale, relevant des normes bancaires internationales, et le cash collatéral qui, lui, est une garantie liquide exigée par la banque, et rémunérée entre 3 et 6% selon le pays. Ainsi, pour le banquier Tshipama, emprunter peut être un signe de bonne gestion financière, démontrant la capacité de l’emprunteur d’intégrer le coût du capital dans la rentabilité du projet. «Cela implique une analyse minutieuse des taux d’intérêt et des prévisions de rendement, ainsi que la capacité à équilibrer les risques et les opportunités».
Garantie ou cash collatéral
La contribution de l’industriel togolais Bertin Tchoffo au débat a concilié les deux positions antagonistes. De son avis, la diversification des sources de financement, combinant fonds propres et emprunts, peut offrir une meilleure résilience financière aux porteurs de projets. Il a encouragé les porteurs de projets à intégrer une approche équilibrée pour se positionner favorablement sur le marché tout en minimisant les risques associés à l’emprunt. De cet échange, il ressort que le rôle des banques dans le financement de l’investissement est tout aussi crucial que complexe. Il revient alors aux entrepreneurs de naviguer prudemment entre les opportunités offertes par le crédit bancaire et les risques qu’il engendre.