Un capitaine marocain raconte la prise de l’îlot Leila par l’armée espagnole

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Quelques jours après la publication par certains médias espagnols d’une vidéo montrant la prise «dégradante» de l’ilot Leila par l’armée ibérique, un capitaine marocain qui faisait partie du contingent des soldats présents sur le rocher raconte la «version marocaine» de ce qui s’est déroulé.

Une semaine après la «célébration» par plusieurs médias espagnols du 15e anniversaire de la prise de l’îlot Leila par l’armée ibérique, et la fuite d’une vidéo «dégradante» montrant l’arrestation des six soldats des FAR présents sur le rocher, c’est un capitaine marocain qui raconte cette fois-ci sa version de ce qui s’est déroulé ce 17 juillet 2002 sur l’île située à quelques dizaines de mètres seulement des côtes marocaines.

Le capitaine Ahmed Morsali, chef hiérarchique des soldats présents alors sur le rocher, a raconté à nos confrères d’Akhbar Al Yaoum, dans sa livraison du lundi 24 juillet, la folle semaine qui a failli conduire à un affrontement ouvert entre les armées marocaine et espagnole. «C’était un 11 juillet 2002. Le chef de la base d’Al Hoceima m’a contacté vers 18h pour m’informer d’une mission hautement secrète qui allait m’être confiée», raconte le militaire marocain. «Il m’a alors demandé de rassembler quelques éléments pour me rendre sur l’îlot Leila. J’ai tout de suite acquiescé, même si je ne connaissais pas l’endroit exact où se situait cette île», poursuit Morsali.

Mission ultra-secrète
«Le lendemain, nous nous sommes dirigés vers la plage de Marina Smir à Mdiq, un chef de la marine royale nous a alors fourni de la nourriture et un certain nombre de matériels», ajoute le soldat qui n’a cessé d’insister sur le caractère secret de sa mission. «D’ailleurs, lorsque nous nous sommes ensuite dirigés vers le point de départ pour l’îlot, nous avons annoncé à des gendarmes qui nous avaient apostrophés au niveau d’un checkpoint, que nous allions à l’îlot pour y camper quelques jours», confie Ahmed Morsali.

Le 16 juillet au soir, les soldats marocains débarquent sur l’îlot. Ils y trouvent un troupeau de brebis. «Nous avons planté deux drapeaux marocains sur le sommet de l’île. Ce qui a attiré l’attention de la Guardia civil qui a commencé à roder autour de l’île, avant qu’un hélicoptère espagnol n’apparaisse au-dessus de nos têtes. J’étais alors en contact permanent avec mon supérieur hiérarchique», raconte l’officier marocain.

«Nous avons ensuite décidé de sacrifier une des brebis du troupeau pour le dîner. La brebis appartenait à une certaine Rahma, qui vivait en contrebas de l’îlot. Vers minuit, mon téléphone a sonné. Mon chef m’a alors informé que les forces espagnoles étaient sur le point de débarquer sur l’île, vers 4 heures du matin», relate Morsali pour qui le débarquement de l’armée espagnole était tout sauf une surprise.

« Je préfère mourir plutôt que de me rendre »
C’était le 17 juillet à 4h15 précise que les forces spéciales ont débarqué. Le capitaine marocain raconte: «Ils ont commencé par ôter les drapeaux marocains pour les remplacer par un drapeau espagnol. Nous étions armés contrairement à ce qui se dit actuellement […] mais notre chef nous a intimé de ne pas ouvrir le feu pour éviter toute confrontation et nous rendre ensuite aux Espagnols. J’ai ordonné à un de mes soldats de marcher vers eux, tout en posant ses mains derrière sa tête. Je lui ai demandé de s’agenouiller lorsqu’il s’approcherait d’eux. Tous les autres soldats marocains l’ont imité, sauf un, qui s’appelle Habib et est originaire d’Oujda. Il a refusé de se rendre et m’a déclaré, en pleurs: ‘je préfère mourir plutôt que de me rendre’. Je l’ai alors convaincu qu’il valait mieux qu’il se rende et que c’était la décision la plus sage, car elle allait nous éviter la confrontation».

«Les soldats espagnols n’ont pas cru leurs yeux lorsqu’ils ont découvert que nous n’étions que six. Ils s’attendaient à beaucoup plus. Ce qui explique l’impressionnant dispositif qu’ils ont mis en place pour débarquer. Car en plus des forces spéciales espagnoles sur l’îlot, il y avait aussi des avions de chasse F18, deux sous-marins, des frégates ainsi que des hélicoptères. Plus tard, nous avons appris que l’Algérie avait livré des informations erronées aux Espagnols sur le nombre de soldats marocains présents sur l’îlot, en leur livrant des chiffres exagérés», poursuit le capitaine Morsali.

 

Le capitaine raconte ensuite son arrestation: «Nous avons été menottés. Ils nous ont mis un sac sur la tête avant de nous embarquer dans un avion. Quelque temps plus tard, nous nous sommes retrouvés dans un poste de la Guardia civil. Des soldats espagnols y buvaient du café. J’ai été surpris de la présence de soldats espagnols d’origine marocaine. L’un d’entre eux, originaire de Nador, a essayé de me consoler». Après avoir été photographiés une dernière fois par les soldats espagnols et inspectés par un médecin, les soldats marocains ont été reconduits à la frontière marocaine.

Une semaine après l’incident, le soldat affirme avoir reçu une lettre du roi Mohammed VI dans laquelle le souverain a rendu hommage au contingent des FAR capturés sur l’îlot Leila.

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