Agriculture: « La pire sécheresse depuis 1981 »

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Le Maroc vit actuellement l’une des pires sécheresses de ces quarante dernières années, ce qui compromet grandement la campagne agricole actuelle.

« Ça y est, on y a lâché nos bêtes». Les deux hectares de blé cultivés par Hicham, jeune paysan qui vit près de la commune rurale de Laghdira (Province d’El Jadida), a perdu tout espoir de récolte après cinquante jours sans pluies. Sachant sa moisson condamnée, il préfère lâcher sa douzaine de brebis dans ses champs de céréales. Maigre consolation pour ce petit agriculteur qui a investi d’importantes sommes d’argent l’automne dernier, notamment en intrants, et qui sait qu’il ne récoltera pas la moindre botte de paille à la fin de la saison tant ses cultures sont arrivées à un stade avancé de décrépitude.

«La situation est grave», lâche pour sa part Abdelkader Kindil, président de la Chambre d’agriculture de la région Casablanca-Settat. Interrogé par H24info, l’homme ne cache pas son désarroi face à la situation que vivent des millions d’agriculteurs au Maroc, dont une grande majorité vivent exclusivement de la pluie à travers des cultures céréalières ou fourragères. Preuve de la gravité de la situation, Kindil admet que le Maroc vit actuellement «la pire sécheresse depuis 1981».

Le manque de pluies touche la majorité des cultures (céréales, légumineuses, maraîchage) y compris les cultures irriguées. « Les nappes phréatiques subissent également le manque de précipitations. On le constate partout, les puits s’épuisent les uns après les autres », s’alarme Kindil.

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Comment expliquer ce manque criant de précipitations? L’Anticyclone des Açores, répond la Direction de la météorologie nationale. « Les faibles précipitations observées durant cette saison hivernale au Maroc et au sud de l’Europe est due à un ensemble de conditions météorologiques et climatiques défavorables, a souligné Lhoussaine Youabd, chargé du service communication à la Direction de la Météorologie Nationale (DMN).

« La situation météorologique a été caractérisée au cours de cette période hivernale par la présence de l’anticyclone des Açores, une zone de haute pression atmosphérique située dans l’océan Atlantique Nord et qui s’étend sur le sud de l’Europe, l’ouest du bassin méditerranéen et le Maroc. Cette situation a influencé les conditions météorologiques de cette saison favorisant la prédominance d’un temps stable, calme et généralement sec », précise la même source, ajoutant que la position centrée de l’anticyclone des Açores sur le proche Atlantique et le bassin méditerranéen, « repousse la majeure partie des perturbations atmosphériques, génératrices des pluies vers le Nord et les îles Britanniques ainsi que vers l’Europe de l’Est, les Balkans et le Moyen-Orient ».

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« Nous constatons que le cumul moyen des précipitations enregistrées au niveau national du premier septembre 2021 au 31 janvier 2022 est de 38.8 mm, contre une normale climatologique de 106.8 mm calculée sur la même période entre 1981 et 2010, soit un déficit de 64 %. Le déficit par rapport à la saison précédente 2020-2021 est de 53 % », a également relevé Youabd.

La sécheresse touche en réalité l’ensemble du Maghreb et le sud de l’Europe. L’Espagne et le Portugal enregistrent également un manque de précipitations préoccupant pour cette période hivernale. Au Maroc, les autorités espèrent encore que la pluie s’abatte sur le pays même si le mal est en grande partie déjà fait. « S’il pleut d’ici fin février, les précipitations pourront avoir un impact salvateur, ne serait-ce qu’au niveau des pâturages, ce qui fournira du fourrage pour l’alimentation animale », espère Abdelkader Kindil.

L’agriculture emploie près de la moitié des Marocains. Cette frange de la population s’apprête à vivre une situation critique si l’Etat ne lui vient pas en aide. Le ministère de l’Agriculture multiplie ces derniers jours les réunions pour trouver des moyens d’aider les agriculteurs, mais aussi les éleveurs, à réduire leurs pertes. « Nous prévoyons de distribuer, le 10 mars prochain, de l’orge subventionné pour aider les éleveurs à faire face à la rareté du pâturage et la cherté des aliments industriels », rassure le cadre du ministère de l’Agriculture. Pas sûre que cette mesure suffise à soulager un monde paysan qui, outre la sécheresse, subit de pleins fouets une inflation multidimensionnelle.

 

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