Le gouvernement espagnol veut exhumer Franco pour le 10 juin

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L'ancien dictateur, le général Franco, est décédé le 20 novembre 1975 à Madrid. DR

Le gouvernement espagnol prévoit de retirer la dépouille de Francisco Franco de son mausolée pour l’inhumer dans un cimetière aux côtés de son épouse le 10 juin, à moins que la famille du dictateur ne réussisse in extremis à bloquer le transfert.

L’exhumation aura lieu le 10 juin et l’inhumation le même jour dans un panthéon du cimetière de Mingorrubio-El Pardo, au nord de Madrid, a annoncé vendredi la vice-présidente du gouvernement Carmen Calvo, à six semaines d’élections législatives. Elle a rappelé que c’est là que repose l’épouse du dictateur, Carmen Polo. L’opération pourrait pourtant encore être retardée, voire bloquée, par une décision de justice. « Les tribunaux feront leur travail », a simplement déclaré la ministre.

Dès son arrivée au pouvoir en juin 2018, le gouvernement socialiste de Pedro Sanchez avait annoncé qu’il retirerait la dépouille de Franco du « Valle de los Caidos », mausolée pharaonique en mémoire des combattants « tombés » pendant la guerre civile de 1936-1939, à une soixantaine de kilomètres à l’ouest de Madrid. Le « Généralissime », vainqueur de ce sanglant conflit, y a été inhumé à sa mort en 1975. Il avait fait construire ce monument, une basilique creusée à flanc de montagne et surmontée d’une croix de 150 mètres de haut, par des milliers de prisonniers politiques dans les années 40 et 50.

A l’intérieur sont enterrés 27.000 combattants « nationalistes » qui se battaient sous ses ordres et quelque 10.000 soldats républicains, déterrés des cimetières et des fosses communes sans que les familles en aient été informées. La tombe du dictateur, couverte de fleurs fraîches et vénérée par les nostalgiques du franquisme, se trouve devant l’autel de la basilique, un « lieu d’exaltation » inacceptable pour le gouvernement socialiste.

Parcours d’obstacles

Le transfert des restes du dictateur, s’il a lieu à la date annoncée, mettra fin à près d’un an de résistance de ses descendants et des moines bénédictins qui entretiennent le mausolée. Le gouvernement a d’abord dû obtenir l’assentiment du Vatican et a ensuite rejeté la proposition de la famille de réinhumer le dictateur dans la caveau familial dans la cathédrale de l’Almudena, située en plein coeur de Madrid. Il craignait que la cathédrale, voisine du Palais royal, ne se transforme en lieu de pèlerinage des nostalgiques de la dictature.

Le 15 février, le gouvernement avait donné 15 jours à la famille Franco pour proposer un nouveau lieu de sépulture, faute de quoi il le choisirait lui-même. Il a donc opté pour le cimetière de Mingorrubio-El Pardo qui remplit les conditions « de dignité et de respect » pour la sépulture, selon un communiqué qui précise que le transfert se fera discrètement, dans le respect de l’intimité. Les médias n’y auront pas accès.

Mais la famille a déposé un recours devant la Cour suprême contre cette décision du conseil des ministres. Et la Fondation nationale Francisco Franco, qui défend la mémoire du « Caudillo », a annoncé vendredi qu’elle déposerait à son tour un recours la semaine prochaine. L’annonce de la date du transfert traduit « un manque de respect pour le pouvoir judiciaire », a déclaré à l’AFP le président de la Fondation Juan Chicharro, en minimisant sa portée. « Ce n’est qu’un coup de propagande médiatique et électorale », a-t-il affirmé.

Campagne électorale

Pedro Sanchez, qui dirige un gouvernement minoritaire, a en effet convoqué des élections anticipées le 28 avril et l’exhumation des restes du dictateur est l’un de ses chevaux de bataille. Un précédent gouvernement socialiste avait fait voter une « Loi de mémoire historique » pour faire retirer les vestiges de la dictature, identifier les dizaines de milliers de corps jetés dans des fosses communes et réhabiliter la mémoire des vaincus, condamnés sous le franquisme.

Le conservateur Mariano Rajoy, évincé par Pedro Sanchez l’an dernier, s’était vanté publiquement de ne pas avoir dépensé un euro pour appliquer la loi. Le gouvernement issu du prochain scrutin, quelle que soit sa couleur, sera tenu de mettre en oeuvre la décision prise par le conseil des ministres et approuvée par le parlement en septembre 2018, a assuré Calvo.

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