Tariq Ramadan/Henda Ayari : les dessous d'une confrontation tendue

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L’audition devant les juges, jeudi, de l’islamologue et de sa première accusatrice n’a pas permis d’établir la date du viol présumé.

Une date encore floue, mais des accusations de viol bien précises. Première femme à avoir porté plainte, en octobre dernier, contre Tariq Ramadan, Henda Ayari était confrontée, ce jeudi pour la première fois, au prédicateur suisse, mis en examen pour viols et incarcéré depuis le 2 février. Mais la date à laquelle elle situait son viol, le 26 mai 2012, n’est pas plausible: ce jour-là, ont établi les enquêteurs, l’ex-salafiste, devenue militante laïque, mariait son demi-frère près de Rouen. «Six ans après, confie-t-elle, j’assume totalement le fait d’avoir oublié la date exacte de cette agression traumatisante!»
La plaignante avait d’abord indiqué une période – entre le 31 mars et le 8 avril 2012 – et un hôtel, l’Holiday Inn de la gare de l’Est, à Paris, avant de situer le viol présumé deux mois plus tard, le 26 mai, cette fois à l’hôtel Crowne Plaza. «Entre-temps, j’ai retrouvé mon agenda de 2012 et mes souches de chéquier», s’était-elle justifiée. Sur la page du 26 mai 2012 de cet agenda, a pu constater Le Figaro, figurent le nom et l’adresse de ce deuxième hôtel, place de la République, ainsi que le trajet en métro, avec les lignes et les changements, indiqués selon elle par Tariq Ramadan, depuis la gare Saint-Lazare, où elle devait arriver en train depuis Rouen. Le tout raturé. «Sans doute parce qu’on a dû annuler à cause du mariage de mon frère», réalise Henda Ayari aujourd’hui. «Au lieu de dire“je ne sais pas”, elle a donné une date possible, souligne Me Francis Szpiner, l’un de ses avocats. Elle n’aurait pas dû. Mais ça ne remet pas en cause l’essentiel: elle a maintenu ses accusations face à M. Ramadan.»
Stratégie de déni
Ce rendez-vous, «le 26 mai, dans cet hôtel, je l’ai pas inventé!», s’exclame Henda Ayari. À cette date, «une réservation avait bien été effectuée au Crowne Plaza pour Tariq Ramadan, poursuit l’avocat. Réservation annulée le 4 mai. Et là, ça change tout!». Lorsque la juge a demandé à l’islamologue comment la plaignante avait pu savoir qu’il avait une réservation au Crowne Plaza ce soir-là, «il a dit “je ne l’explique pas”», raconte Me Szpiner. Le conseil de Tariq Ramadan, Me Emmanuel Marsigny, n’a pas répondu aux sollicitations du Figaro, mais a indiqué à l’AFP qu’il allait formuler une nouvelle demande de remise en liberté pour son client. «Il n’y a plus pour moi de dossier Ayari, puisqu’on est incapable de savoir quand et où le prétendu viol aurait eu lieu», a-t-il argumenté.
Le témoignage de l’amie d’Henda Ayari, qui devait l’héberger la nuit du rendez-vous, mais qui ne l’a vue revenir qu’au petit matin, a été balayé, selon Me Szpiner, par l’accusé. «On sait que le viol a eu lieu entre le 26 avril et le 5 juin, insiste l’avocat. On sait aussi qu’il pleuvait. En croisant un certain nombre d’éléments, on pourra retrouver la date». Finalement, résume Me Jonas Haddad, son autre conseil, «Henda Ayari a assuré la confrontation, malgré les pressions et tous ceux qui pariaient qu’elle se déroberait. Quant à Tariq Ramadan, il continue de s’enferrer dans une stratégie de déni, tout en avouant maintenant ouvertement avoir une vie extraconjugale débridée».
Mercredi, la confrontation qui devait opposer Tariq Ramadan à «Christelle», la seconde plaignante, avait été annulée pour des raisons médicales. «Elle a eu un grave souci de santé dimanche, confirme son conseil, Me Éric Morain. Cette confrontation, qu’elle attendait avec impatience, aura bien lieu, mais à la rentrée.»

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