L’Inde rejoint le club des pays capables de détruire un satellite

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AFP

Cette démonstration de force, dont seuls les États-Unis, la Russie et la Chine étaient jusqu’à présent capables, intervient sur fond de campagne électorale.

Il est 11 h 23 mercredi quand le premier ministre Narendra Modi annonce sur Twitter qu’il est sur le point de s’adresser à la nation d’ici trente minutes. Une heure plus tard, face caméra, le chef de l’exécutif proclame que l’Inde vient de tester avec succès un missile antisatellite. «L’objectif […] se trouvait en orbite basse autour de la Terre. Le missile a volé jusqu’à 300 km d’altitude et détruit sa cible trois minutes après son lancement», clame le dirigeant d’une voix martiale. Jusqu’alors, seuls les États-Unis, la Russie et la Chine avaient ce genre d’armes.

Le test est une démonstration de force. «Il est possible d’aveugler un satellite avec un laser. La cible devient inopérante et il n’y a pas de débris dans l’espace», explique un scientifique sous couvert d’anonymat. Mais le recours au missile permet de montrer au monde la force de frappe indienne: «Plusieurs pays disposent de radars qui suivent les engins en orbite. Après l’essai, ils vont voir qu’un satellite a disparu des écrans. Personne ne pourra nier la réussite du test», avance le scientifique.

Le ministère des Affaires étrangères a déclaré qu’il s’agissait de «vérifier que l’Inde a les moyens de défendre ses biens spatiaux», satellites espions, de navigation et de communications entre autres. Cette annonce intervient alors que le rival chinois accroît ses capacités antisatellites depuis plus de douze ans. En février, l’agence américaine de renseignement militaire, la DIA, avait publié un rapport sur le programme militaire spatial de la Chine.

Pékin «développe des armes laser pour perturber ou endommager les capteurs des satellites, écrivait la DIA. D’ici 2020, la Chine devrait mettre en service une arme laser déployée au sol qui pourra contrer les capteurs placés en orbite basse. […] Les écrits de l’Armée populaire de libération indiquent que les satellites de reconnaissance, de communication et de navigation seront les premières victimes d’une attaque.»

Dans ce contexte, «nous avons montré notre capacité militaire spatiale et affirmé notre force de dissuasion», assure Ajey Lele, de l’Institut d’études et d’analyse de défense (IDSA), un centre de recherche public de Delhi.

Face à une Chine dont les ambitions militaires inquiètent plusieurs pays, l’Inde a aussi tenté de se poser en puissance responsable et pacifique. En 2007, quand Pékin avait testé son premier missile antisatellite, l’essai avait laissé plus de 3 000 débris dans l’espace, très dangereux pour les autres engins en orbite. «Le satellite que l’Inde a détruit était très bas dans l’atmosphère et les débris vont brûler au lieu de s’éparpiller», ajoute le scientifique précité. De plus, la Chine n’avait pas expliqué pourquoi elle avait réalisé le tir de 2007, provoquant de vives inquiétudes dans la communauté stratégique américaine. Un manque de transparence que l’Inde a voulu éviter en précisant que le lancement n’était dirigé contre personne, sans convaincre. Le Pakistan a accusé à mots couverts son voisin et adversaire de déclencher «une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique».

Reste que pour le premier ministre indien, issu de la droite ultranationaliste et qui briguera un second mandat aux législatives d’avril et mai, le test doit flatter le nationalisme de ses électeurs. «Pour chaque Indien, c’est un moment de fierté comme aucun autre», a lancé Modi alors que l’opposition l’accuse d’avoir laissé la pauvreté et le chômage empirer depuis cinq ans.

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