Immobilier: les recettes des opérateurs pour contrer la morosité du marché

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Grand angle. Le marché immobilier au Maroc stagne depuis quelques années, un fait notable dans un pays où la demande est habituellement plus forte que l’offre. Une morosité que les professionnels imputent à des problèmes d’ordre structurel, conjoncturel, voire social.

Les observateurs accusent les promoteurs immobiliers qui, toutes catégories confondues, n’ont pas su prendre en compte les exigences du marché et son évolution dans le temps. C’est là l’une des raisons majeures de la morosité du marché immobilier dans notre pays. Face à ce constat, les sociétés immobilières cherchent, inlassablement,  des solutions pour sortir de l’impasse et font preuve d’ingéniosité pour contrecarrer les méventes dans le secteur de l’habitat dit social.

C’est le cas d’Addoha qui reconnaît que cette question est au centre de ses préoccupations et que, tout particulièrement en fonction du coût du foncier, elle travaille sur la possibilité de repenser le concept du logement social en proposant, pour le même prix des appartements en F4.

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Le groupe Saada pour sa part, propose un nouveau concept pilote du logement social: un duplex de 70m². Bien qu’exigu, ce type de logement présente un nouveau modèle de sociabilité alliant intimité et modernisme, en apportant une touche de standing (finition, ascenseurs, espaces verts…) Saada signe, ainsi une révolution dans l’habitat dit social.

Le groupe Jamai, pionnier du secteur de l’immobilier, prône une nouvelle approche, celle de la proximité. Tous les programmes de logement social du groupe proposent la proximité des centres d’intérêts des citoyens: administrations, centres hospitaliers et mosquées garantissant ainsi une affluence maximale d’acheteurs potentiels.

 

Crise économique ou crise de confiance ?

De son côté Mohamed Lahlou, président de l’association marocaine des agents immobiliers (AMAI), attribue ce repli à une crise de confiance. «Les petits projets neufs en R+5 s’écoulent beaucoup plus vite. En revanche, les grands projets ne se vendent plus comme avant. Il y a eu des déceptions, des problèmes, des contentieux… les clients ont peur d’acheter sur plan».

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Dans une interview accordée à L’Economiste, (5 mars 2019), Taoufik Kamil, président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI) avance que «presque tous les indicateurs sont au rouge comme le souligne le dernier rapport de la Direction du ministère de l’Economie et des Finances». Et d’ajouter : «le bien immobilier reste hors de portée pour beaucoup de nos concitoyens […] la cherté du bien découle essentiellement du coût élevé du foncier, des taxes et droits que l’Etat fait subir aussi bien au promoteur qu’à l’acquéreur». Une déclaration qui rejoint celles d’autres promoteurs immobiliers qui accusent la hausse des prix à la consommation impactant les finances des ménages, l’apport personnel n’étant plus possible et la vente ne peut avoir lieu.

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La résidence secondaire sous la loupe

D’aucuns jugent que c’est le moment d’acheter, les plus habiles, eux restent aux aguets, l’immobilier risque de sombrer davantage dans une profonde léthargie à l’issue incertaine. A en croire M. Larbi Bounejja, agent immobilier, la cadence des ventes devrait ralentir davantage surtout dans l’immobilier résidentiel. Et d’ajouter : «L’engouement qu’a connu le consommateur, MRE et étrangers compris, pour la résidence secondaire n’est plus d’actualité, pire encore les propriétaires de ce type de logement, aujourd’hui, vendent à perte, concurrençant ainsi des promoteurs qui ont misé fort sur ce créneau en mettant leur savoir-faire et engageant de gros moyens financiers. A cela s’ajoute les problèmes liés aux impôts, les droits et taxes liés à la résidence secondaire sont exorbitants et de ce fait, les ménages préfèrent de loin l’achat dans l’habitat non structuré».

Un peu plus de 1800 Notaires se partage la maigre pitance

D’un autre côté, l’activité notariale connaît, elle aussi, un net repli. Plusieurs notaires ont vu leurs chiffres d’affaires baisser de 75%, confie Maître Nourredine Berzouk, notaire à Casablanca. «La baisse des transactions immobilières se répercute directement sur notre profession», insiste-t-il. Du coté des banques, malgré les taux d’intérêts pratiqués ces derniers temps décrits comme étant historiquement très bas, l’obtention d’un crédit relève de parcours du combattant. Les banques deviennent très réticentes quant à leurs octrois. La crise de confiance qui distingue nos institutions financières, pousse celles-ci à demander aux clients toujours plus de garanties et alors plus de papiers administratifs à produire. Les banques participatives ne sont pas épargnées. Ce nouveau modèle de financement, quoiqu’il connait une grande affluence, enregistre de grands retards dans le traitement des dossiers (3, 4 voire 5 mois), «c’est hallucinant, le temps c’est de l’argent», rétorque Me Berzouk. Une grande partie des clients abandonne, les plus coriaces, eux résistent, encore faut-il qu’ils aient de bons salaires. Les chiffres du Haut-commissariat au plan (HCP) font ressortir que 40% parmi ceux qui sont désireux d’acheter un appartement touchent des salaires entre 2.000 à 4.000 dirhams.

Sur un autre plan, Me Berzouk évoque l’importance des référentiels de l’immobilier, mis en ligne depuis 2015 par la Direction Générale des Impôts (DGI), supposés standardiser les prix du mètre carré dans chaque région du Maroc. Malheureusement, ces baromètres immobiliers présentent des inconvénients, notamment si le prix de vente est inférieur à celui préétabli. Dans ce cas, l’impôt- Taxe sur profit immobilier (TPI)- à payer est calculée sur la base du référentiel et le vendeur se verra taxé sur un prix qu’il n’a pas perçu. Un cauchemar pour le vendeur qui préfère garder parcimonieusement son bien immobilier jusqu’à nouvel ordre.

Un autre secteur, non sans importance : les terrains non bâtis. Les propriétaires de ces derniers se voient obligés de payer la Taxe sur terrain non bâtis (TNB). Une taxe payée au mètre carré, ce qui accable davantage aussi bien les petites bourses que les grosses fortunes.

En attendant, la léthargie du marché continue à sévir dans les grandes villes du royaume à l’instar de Casablanca, Rabat, Tanger, Agadir et davantage à Marrakech, Fès et Meknès. Promoteurs, agences immobilières, experts immobiliers, et autres acteurs du foncier sont unanimes: l’immobilier est en crise et le bout du tunnel n’est toujours pas visible.

Khalid Tegmousse (Journaliste stagiaire)

 

 

 

 

 

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